28 février 2010

Un casting de faux culs

La dernière réunion du Bureau National du PS a accouché d'une tartufferie d'une ampleur inégalée pour un parti qui est pourtant passé maître en la matière. Les socialistes pro-Frêche figurant sur la liste du Président sortant en Languedoc-Roussillon sont exclus. Mais, dès le lendemain de l'élection, une "Mission de réconciliation" les réintègrera.

Ayant le souvenir d'une exclusion collective effectuée avec moins de mansuétude à Nice, je me dis que le PS, seul parti français pratiquant encore l'exclusion, vient d'inventer le stalinisme à géométrie variable. A vrai dire, je ne suis pas surpris par une telle décision car, la semaine dernière, le Président du Conseil général des Pyrénées Orientales et Vice-Président frêchien à la Région, nous affirmait qu'il n'envisageait aucunement l'exclusion car, disait-il, "le PS, ici, c'est nous !" (voir à ce sujet, sur le blog de Dominique, Jean-Claude Gayssot soutient Frêche).

En réalité, le scénario de cette "affaire Frêche" a été rendu possible grâce à un incroyable casting de faux-culs :

- Martine Aubry, tout d'abord en prétendant replacer les valeurs au centre du combat socialiste alors que sa propre élection à la tête du parti est le fruit d'une tricherie avérée (voir sur ce blog, Les Bongo du PS) ;

- Rebsamen, Collomb, Hollande, quand ils prétendent défendre la démocratie militante en soutenant Frêche sans s'être vraiment opposé à Aubry au début de l'affaire ;

- tous les autres apparatchiks comme Hamon qui, après avoir armé d'un glaive vengeur le bras d'Aubry, regardent avec inquiétude le vent tourner et, du coup, prêchent la modération.

En fait, l'encombrant Frêche n'était qu'un leurre dans toute cette histoire. Aubry a vu là une occasion de s'affirmer comme présidentiable, en rassemblant le parti sur le dos d'une personnalité contestée qu'elle pensait isolée (c'était plus facile que sur la réforme des retraites, par exemple).  Rebsamen et Collomb ne veut pas que les ambitions de Martine contredisent celles de leur propre présidentiable et Hollande protége sa candidature. Quant aux autres, n'ayant pas encore choisi de peur de ne pas enfourcher le bon cheval, ils travaillent au doigt mouillé.

C'est donc maintenant aux électeurs de gauche de jouer, s'ils veulent en finir avec ces navrantes manoeuvres politiciennes. La droite étant définitivement hors course pour ces régionales - il faut dire qu'elle y a mis du sien -, l'occasion est belle à gauche de jouer la carte de la rénovation en se débarrassant du syndrome étouffant du vote utile. Si on veut battre en brèche le désespérant monopole du PS sur la gauche, il suffit simplement de voter au premier tour pour les autres listes progressistes. Ainsi, la définition d'un nouveau rapport de forces obligera les socialistes à rénover malgré eux.

Dans les Alpes-Maritimes, un beau score de la liste d'Europe Ecologie conduite par André Aschiéri obligerait Michel Vauzelle à abandonner certaines dérives clientélistes et à donner des responsabilités importantes à des élus porteurs de nouvelles pratiques politiques. Franchement, qui s'en plaindrait ?  Sûrement pas Gauche Autrement.

On a la démocratie qu'on mérite, on a la gauche qu'on mérite, on a les élus qu'on mérite. Si à une époque on affirmait que la révolution était au bout du fusil, aujourd'hui, plus modestement, pour ces régionales, constatons que la rénovation est au bout du bulletin de vote...

24 février 2010

Vanbiencouver


Il y a quelques jours, sur ce blog, j'étais persuadé que la narration de mon aventure dans la tempête de neige du Grand (Nice) Nord ferait hurler de rire mes amis québécois...

Eh bien, la réponse est arrivée ce matin par colis postal: loin de prendre à la légère les intempéries niçoises, un expat ami nous a envoyé du Canada les équipements complets des participants aux JO de Vancouver.

Que cette photo soit à la fois une façon de remercier cet ami et un hommage à Nelson Montfort, le Malraux du short track, et à son égérie Ha-ri-ko!

19 février 2010

L’anse de Paulilles


 
La Montagne
Nous sommes le 3 décembre 1870. A la fois représentant d’Alfred Nobel, l’inventeur de la dynamite, et délégué militaire de Léon Gambetta, un certain Paul Barbe lance à Paulilles la construction de la première dynamiterie française. Petit coin de paradis sur la Côte Vermeille entre Port Vendres et Banyuls, le site de Paulilles est en effet adéquat pour bâtir une telle fabrique, « le plus loin possible des frontières avec l’Allemagne » avait dit Léon. L’anse dispose d’une rivière et de puits d’eau indispensables au nettoyage de la nitroglycérine. De plus, isolée des lieux de vie avoisinants, les risques en cas d’explosion seront limités.

Jusqu’en1984, l’usine employant plusieurs centaines de personnes va fonctionner comme une petite république avec son village, ses fêtes et ses drames. Malgré une discipline de fer, les maladies professionnelles et les accidents sont nombreux. Mais entre des logements plutôt confortables et la plage forcément privée, on vit plutôt bien aux Paulilles, enclave de prospérité dans ce pays pauvre d’agriculteurs et de pêcheurs. Aussi, la fermeture sera vécue comme un petit drame dans la région.
C’est un peu plus tard qu’interviendront Conservatoire du littoral et Conseil Général pour sauver un site que les vautours de la spéculation immobilière veulent transformer en marina… Une de plus !

Paysage préservé et mémoire des hommes honorée, un beau travail sera réalisé par les deux institutions publiques. L’anse, ses plages, sa pinède, ses eaux turquoises ont été rendues aux familles, aux amoureux et aux promeneurs solitaires. Suffisamment de bâtiments et de lieux ont été préservés pour que le visiteur puisse reconstituer un siècle de mémoire ouvrière. Des scènes de la vie quotidienne ont été peintes sur la façade des bâtiments, les dangereuses installations de la chaîne de fabrication des explosifs sont encore visibles sur la mystérieuse Montagne du cap nord, le jardin du directeur fleure toujours le paternalisme bienveillant et anti-syndical de ce huis clos industriel.

L’Histoire, ce n’est pas seulement les champs de bataille et les monuments grandiloquents, c’est aussi la vie simple des gens simples. Comme cette dame entre deux âges croisée par hasard et interpellée par Dominique : « Oui, j’ai vécu ici, bien sûr beaucoup de choses ont changé mais je retrouve ma vie d’avant et je viens  la faire partager à mes amis ». A ce moment précis son sourire semblait dire : « Voyez vous, je ne suis pas un grain de poussière dans le tourbillon du siècle, ma vie était là et elle a compté… » .

13 février 2010

Le Village pour éviter la Jungle

Pour la troisième fois en trente-quatre jours, j’ai rendu visite au Village, rue Clément Roassal, à Bernard Neuville et à Térésa Maffeis ainsi qu’aux autres bénévoles qui se battent depuis des semaines pour obtenir un logement provisoire à la cinquantaine de demandeurs d’asile présent sur les lieux.

Comme l’avait rappelé Dominique à la suite d’une de ses visites (voir sur son blog « Droit d’asile au village »), il ne s’agit pas de disserter sur les phénomènes migratoires en France mais tout simplement de respecter la loi républicaine et  le droit international.

Des hommes sont menacés dans leurs pays (comment peut-on en douter ? ils viennent de Tchétchénie, du Darfour, d’Erythrée, du Soudan…), ils demandent asile à la République Française, les tribunaux de celle-ci vont tout à fait normalement vérifier l’authenticité de leur démarche. Mais chacun sait – et on le regrette – que la procédure est longue, très longue. Il est donc normal qu’en attendant la réponse ces demandeurs d’asile, nos invités, soient hébergés dignement.

Ils ne demandent rien d’autre. Et pourtant la préfecture souffle le chaud et le froid et traîne…traîne…traîne… J’espère simplement, au nom de l’idée de neutralité du service public que j’enseigne à mes étudiants, que la proximité des élections n’est pour rien dans cette indolence.

En attendant, Bernard et son équipe ne veulent pas que nos amis soient renvoyés sur les parkings où ils dormaient avant d’être accueillis au Village. Il faut donc les aider avec de l’argent, de la nourriture et du temps, un peu de temps… Merci pour eux.

11 février 2010

« Into the wild » dans le 5e canton


Mes amis québécois vont sûrement hurler de rire, mes étudiants russes sourire et ma famille bourguignonne lever les yeux au ciel, mais je n’ai pas pu m’en empêcher… Dès que la neige a recouvert les premiers toits, j’ai abandonné l’écriture du livre que je dois pourtant rendre en fin de semaine (puisse mon éditeur  ne pas lire ce post…) pour me précipiter dehors tel un gamin surexcité.


Un peu gêné aux entournures par une attitude que d’aucuns pourraient qualifier de puérile, je suis vite rassuré par l’interpellation joyeuse d’un président de comité de quartier d’ordinaire plutôt sérieux et qui manifestement faisait la même chose que moi en zigzaguant sans but précis sous la tempête. Tel un Jack London de Nice Nord, je m'aventure dans le quartier Bellevue, le temps de vérifier qu’aujourd’hui la rue Cavendish ressemblait vraiment à une piste de saut à skis (message personnel pour Claudio).

Un peu plus loin, je tombe sur mon ami Pierre Fiori, lui aussi manifestement en goguette. Et, tandis que nous immortalisons cette rencontre par une photographie, il me rappelle que la dernière fois que nous avons pris la pause ensemble c’était à… Istambul !

En passant devant une devanture, je remarque que j’ai un curieux petit tas de neige sur mon improbable bonnet de laine vert, aux couleurs de la firme Skoda, achetée il y a quelques années sur la route du rallye de Monte Carlo.

La tempête se met à redoubler, mon équipement aléatoire commence à prendre l’eau, … et le travail m’attend. Autant de raisons pour rentrer et retrouver Dominique qui – suppression des cours oblige – avait fait la même chose, dans le 7e canton.


10 février 2010

L’a volé, l’orange…

Kiev, place de l'Indépendance, août 2006

Au départ tout était simple. Un certain Ianoukovitch sponsorisé par Poutine et les oligarques russophones avait triché massivement pour gagner les élections présidentielles. On soupçonnait même son entourage d’avoir tenté d’empoisonner son principal rival Victor Iouchtchenko qui restera d’ailleurs défiguré à vie. Du coup, le peuple était descendu dans la rue pour renvoyer le tricheur dans les poubelles de l’histoire tout en plébiscitant Iouchtchenko comme Président d’une Ukraine qui devait s’ouvrir à la démocratie et à l’Europe.

Il y a quatre étés, nous étions sur la place de L’indépendance de Kiev pour humer le parfum de la Révolution. En réalité, la situation était déjà plus complexe qu’on ne le pensait en France (Cf. « Orange givrée » sur mon blog). Mais de là à imaginer que le 7 février 2010, Ianoukovitch serait élu, sans contestation cette fois, Président, il y avait une marge impossible à franchir.

Bien sûr, Iouchtchenko a fait des erreurs, bien sûr, le camp « orange » s’est divisé et même déchiré, bien sûr, l’Europe n’a peut-être pas fait les gestes nécessaires, bien sûr, il y a la crise… Bien sûr !... Bien sûr !

Mais tout de même, si on veut bien se débarrasser de la langue de bois de l’innocence démocratique, il y a des circonstances où on a bien du mal à se dire que le peuple a toujours raison.

07 février 2010

Le juste combat de GF2A


Néné Badji, pendant son intervention

Au moment où les organisations féministes du département nous proposent un 8 mars ethnocentriste (voir Quels droits pour les femmes ? sur le blog de Dominique Boy-Mottard), comment ne pas saluer l’initiative de « Génération Femmes d’Afrique et d’ailleurs » et de l’adjointe Maty Diouf organisant, à l’occasion de la journée mondiale contre l’excision un débat au Parc Phœnix autour du très beau film d’Ousmane Sembene, « Moolaadé ». 

Le film du réalisateur sénégalais raconte l’histoire d’une femme, Collé Ando (jouée par l’actrice Fatoumata Coulibaly, elle-même excisée) qui se bat seule ou presque dans son village contre ce rite ancestral et barbare.

L’occasion de rappeler que cette pratique touche 150 millions de femmes à travers le monde, 30 à 50 000 en France, y compris à Nice… sous nos yeux !

Une pratique qui, chaque année, tue des milliers de fillettes, traumatise des millions de femmes en provoquant perte de plaisir sexuel, incontinence urinaire et déchirement au moment des accouchements.

J’ai été alerté sur cette question il y a plusieurs années grâce à une étudiante, Nene Badji, qui m’avait demandé de diriger son mémoire consacré à l’excision au Sénégal (voir « J’avais sept ans lorsque j’ai été excisée… » sur ce blog). Aussi, c’est avec émotion que j’ai retrouvé Néné parmi les organisatrices de cette soirée. Pour ma part, je me suis contenté d’écouter avec respect une salle composée majoritairement de femmes africaines (quel contraste avec ces colloques où les principales intéressées ne sont jamais consultées…).

Au-delà de l’émotion, la détermination était au rendez-vous et cela suffisait à faire passer sur la salle Linné un petit souffle d’espoir. C’est dans cet esprit que j’ai suggéré à l’assistance de s’emparer du 8 mars pour faire avancer la cause.

04 février 2010

Vichnievsky-Aschiéri : pour une PACA autrement



Ce matin, nos agendas le permettant enfin, j’ai rencontré pour la première fois Laurence Vichnievsky, tête de liste d’Europe Ecologie en PACA.

Le moins qu’on puisse dire est que le préjugé favorable que j’avais eu d’emblée à l’annonce de sa candidature s’est trouvé renforcé. Cette femme d’allure sportive a l’humilité des grandes, au physique comme au moral. Elle est tout simplement à des années-lumière de l’image d’ange exterminateur dont certains de ses adversaires ont voulu l’affubler.

Certes Laurence veut – avec ses amis – réformer certaines pratiques qui déshonorent la démocratie, lutter contre cette démagogie qui pourrit l’idéal républicain, mais pour autant elle ne poursuit pas un destin vengeur. Elle n’a rien d’une idéologue, ce n’est pas une donneuse de leçons, on la sent accessible au doute.

Ceux qui l’ont accusée d’être une parachutée en seront pour leurs frais, elle connaît très bien la région qu’elle veut désormais servir. Société civile, elle a un regard neuf tout en faisant preuve d’un indéniable sens politique.

Il émane de son équipe rapprochée un enthousiasme qui me rappelle celui qui était le nôtre au sein du PS… dans les années 80, quand nous étions à la veille de réaliser de grandes choses. Cerise sur le gâteau : Sébastien, son jeune directeur de campagne, est un de mes anciens étudiants (déjà apprécié à l’époque).

Si on rappelle que la tête de liste pour les Alpes-Maritimes n’est autre que notre ami André Aschiéri, on se dit que c’est désormais aux électeurs de jouer. Ceux-ci n’ont jamais de mots assez durs pour stigmatiser les affaires et le clientélisme du PS dans les fédérations du sud. Ils ont là, avec le ticket Vichnievsky-Aschiéri, l’occasion de donner un bon coup dans la fourmilière. Comme je l’écrivais ici même en novembre : plus de divorce entre l’efficacité et la morale. Le vote utile va changer de camp… et en plus il sera éthique.

C’est une occasion unique – et sans risque pour la gauche – que les électeurs doivent saisir. Ou alors, à l’instar de ceux de Beausoleil, ils auront gagné le droit de se taire pendant tout un mandat…

01 février 2010

La culture en danger

A l’initiative de Claude Bartolone et du Conseil général du 9.3 circule une pétition intitulée « La culture en danger ». Non seulement j’ai signé cette pétition mais j’ai décidé de la faire connaître et de l’expliquer.

De quoi s’agit-il ? La réforme – programmée par le gouvernement – des collectivités territoriales devrait supprimer la clause dite « de compétence générale » des départements et des régions. Cette formule un peu énigmatique signifie que les deux collectivités en question pouvaient, jusqu’à présent, développer des politiques qui n’appartenaient pas à la liste de leur compétences légales stricto sensu. Ce ne sera donc plus le cas. Or, la culture est probablement l’activité la plus exposée dans ce cas de figure car le quart du financement public local de celle-ci est assuré par les départements et les régions. Supprimer brutalement cet apport reviendrait à asphyxier irrémédiablement un  nombre incalculable d’associations, de compagnies, de lieux et de manifestations culturelles.

Certes, ces politiques ne sont pas toujours parfaites, je regrette de les voir, à l’instar de celle du ministère, s’intéresser plus à l’offre qu’à la demande, à la diffusion qu’à la médiation, et aux paillettes plus qu’à l’éducation, laissant souvent de nombreux publics sur le bord du chemin.

Mais malgré leurs défauts, ces politiques existent. Les supprimer provoquerait une crise sans précédent dans un secteur à l’équilibre si fragile.

La clarification des compétences en matière de décentralisation est certainement une nécessité, mais, dans ce cas précis tout au moins, elle ne doit pas s’appliquer avec brutalité car le remède serait pire que le mal.

Il est donc important d’organiser en la matière une période de transition et de réfléchir à des politiques culturelles de substitution, qui viendraient en complément des compétences légales du département et de la région, avec les collèges, les lycées et la formation professionnelle. Une telle volonté aurait de plus le mérite d’ouvrir la politique culturelle vers cette médiation si souvent oubliée.

En l’absence de telles garanties, je ne peux que souscrire au texte de Claude Bartolone signé à ce jour par plus de vingt-trois mille internautes. A « Gauche Autrement », on a toujours considéré que la culture n’était pas une cerise sur le gâteau ou un supplément d’âme mais un facteur d’émancipation et donc de liberté pour les citoyens. Tous les citoyens.