31 décembre 2006

2007


L'incendie au bord de la prairie
Les pommes de terre dans la cendre
La remise à bateaux loin là-bas au bord du lac
La Croix du Sud
L'Orient lointain
Le Grand Nord
L'Ouest sauvage
Le Grand Lac de l'Ours
Les îles Tristan da Cunha
Le delta du Mississipi
Stromboli
Les vieilles maisons de Charlottenburg
Albert Camus
La lumière du matin
Le regard de l'enfant
Le bain dans la cascade
Les taches des premières gouttes de pluie
Le soleil
Le pain et le vin
Le saut à cloche-pied
Pâques
Les veines des feuilles
L'herbe ondoyante
Les couleurs des pierres
Les galets sur le lit du ruisseau
La nappe blanche au grand air
Le rêve de la maison... dans la maison
Le prochain qui dort dans la pièce voisine
La paix du dimanche
L'horizon
La lumière de la chambre dans le jardin
Le vol de nuit
Le vélo sans les mains
La belle inconnue
Mon père
Ma mère
Ma femme
Mon enfant

Peter Handke et Wim Wenders (Les ailes du désir)

Pour toutes ces choses et bien d'autres encore, une belle année 2007 à tous les lecteurs de ce blog.

Skhirat, 31 décembre 2006

30 décembre 2006

La maison de Michel Jobert


Avec Mohamed, un vieux copain de fac actuellement professeur à l'Université de Rabat, et ses filles, Yasmine et Mouna, nous plongeons dans le Maroc profond.

Visite du district de Moulay-Idriss avec le sous-préfet et les autorités locales : la ville centre de la circonscription doit son nom à Idriss 1er, qui fut au VIIIe siècle le fondateur de la nation marocaine en épousant, lui, l'Arabe, une Berbère. Au menu de la visite : les ruines romaines de Volubilis, l'inattendue maison natale de... Michel Jobert (petit quizz à l'intention des nouvelles générations : mais qui était donc Michel Jobert ?), et une petite discussion sur les difficultés à assurer la transition entre une administration locale d'autorité et la déconcentration découlant naturellement d'un Etat de droit moderne.

En fin de journée, ballade dans la Medina de Fés. Chez les rémouleurs, on aiguise les couteaux annonciateurs de l'Aïd el Kebir qui aura lieu demain. La pauvreté - et parfois même la misère - est palpable dans le dédale des ruelles de cette si vieille ville. On est loin de la presque opulence de Casablanca et Rabat, les villes de la côte. Mohammed VI (M6 pour la jeunesse marocaine) a encore du pain sur la planche pour peu qu'il veuille bien être tout à la fois le boulanger, la boulangère et le petit mitron.

28 décembre 2006

Les cigognes de Chellah

Fin d'année 2006 au Maroc.

Comme en Turquie ou dans le Caucase, j'aime bien respirer l'atmosphère de ces pays ou de ces zones géographiques qui ont vocation à être dans les années qui viennent des passerelles entre les civilisations dont on annonce l'affrontement comme inéluctable. Incontestablement, le Maroc de Mohammed VI a beaucoup d'atouts pour être un de ces traits d'union.

Ce Maroc, qui plus est, entretient une relation toute particulière avec... la section Nice centre du PS, ma section. Qu'on en juge.

En effet, nous sommes ici dans le pays dont la famille de Zineb est originaire. Elle y est d'ailleurs souvent invitée comme experte dans le cadre de ses activités associatives.

M'Hamed, avant et après son passage au 3 avenue Cyrille Besset, a contribué, au plus haut niveau gouvernemental, à la grande réforme du statut juridique de la femme marocaine, ce qui, par les temps qui courent est plutôt méritoire.

Enfin Philippe, notre communiquant haut de gamme, entame ici même une nouvelle aventure professionnelle en créant de toutes pièces la première radio privée marocaine.

Premières impressions de voyage : un coup de coeur et une déception.

Le coup de coeur, c'est à Rabat, le site de Chellah. Une accumulation de ruines romaines et d'architecture mérinide du XIIIe siècle dans un site d'un romantisme à faire pâlir de jalousie Lord Byron lui-même... Et partout, dans le petit vallon de Chellah, sur le minaret, sur les arbres, des dizaines de cigognes.

La déception était un peu prévisible. J'ai bien observé tous les coins et les recoins de l'aéroport de Casablanca à notre arrivée : aucune trace d'Ingrid Bergman et d'Humphrey Bogart. Mais ne désespérons pas... peut-être qu'au retour...

23 décembre 2006

Les « der » de 2006

Cette avant-dernière semaine de l’année est traditionnellement celle des « der ».

Lundi : dernière assemblée plénière du Conseil général.

Une année qui a vu se multiplier les Commissions permanentes (sans la presse !) et les assemblées plénières thématiques extraordinaires (que pour la presse !!). Restent trois rendez-vous en plénière pour travailler normalement et avec un minimum de transparence… C’est peu !
Sur ce blog, voir :
Million dollars baby
Le plan d’Estrosi, le PLU de Peyrat


Mardi : dernière activité universitaire.

Un oral sympathique à l’IUP de Sophia Antipolis. Mon cours sur l’Union européenne a manifestement été compris… et travaillé. Pratiquement que des bonnes notes. Le prof a le sourire.
Sur ce blog, voir :
Good bye Lenin
La règle du jeu
Un lundi à Carlone
Les L3 votent De Gaulle


Mercredi : dernier Conseil municipal.

Avec un bilan inversé par rapport au Conseil général : nous avons eu cette année une dizaine de conseils municipaux ce qui est à l’évidence trop et traduit une gestion quelque peu incertaine. Surtout lorsqu’il s’agit de concentrer les délibérations les plus importantes sur le dernier conseil de l’année, au risque de les traiter à la va-vite, presque en catimini.
Sur ce blog, voir :
Du rififi à la mairie
Tout va très bien Madame la Marquise
Le Conseil vu de l’intérieur
Acropolis, adieu
Stade terminal
Blogspot au CM


Vendredi : dernier apéro de la perm.

Ils sont tous là, les grognards du canton, les fidèles de la cause, les furtifs des grandes occasions… On peut remarquer un contingent impressionnant de nouveaux adhérents : assurément le meilleur vendredi de l’année sur ce plan là. Symbole d’un parti désormais rassemblé, si le punch et les accras sont plutôt fabiusiens, le champagne et les gâteaux sont ségolénistes. Lucien et Dominique nous gratifient d’un petit discours de mobilisation où il est question d’une certaine candidate aux présidentielles.
Sur ce blog, voir :
3 avenue Cyrille Besset
L’apéro du vendredi


Samedi matin : dernier mariage.

Celui de Naïla et de Julien, le petit-fils de notre camarade Jules Tombal, deux enfants du 5e canton et de Nice Nord. Et pour mon cent vingt-septième mariage, une première : le marié porte un superbe uniforme de l’armée de terre.
Sur ce blog, voir :
La laitière et la lectrice
Ramona et Stefen
De René Char au Cantique des cantiques
Les vendanges de l’amour
Le Var et la grande bleue


Samedi soir : dernier match du Gym.

Avec Olivier et l’ami Bruno Della Sudda, nous nous retrouvons, malgré le froid, à notre place habituelle, dans le virage est de la Populaire sud. Discussion passionnée avec les supporters : curieusement, on ne parle pas du Grand stade plombé hier par le Tribunal administratif mais de l’avenir de l’équipe qui vient ce soir de perdre encore une partie de ses illusions avec une défaite face au Racing Club de Lens (2-1).
Sur ce blog, voir :
Ray… Basta ?
Gym tonic
Gazon maudit

20 décembre 2006

La preuve du pudding


Huit heures trente : à l’exception de Marie Billi, malade, toute l’équipe de Nice plurielle est à pied d’œuvre pour entamer l’examen des délibérations du dernier Conseil municipal de l’année. Les dossiers importants sont nombreux.

Budget primitif
Comme l’année dernière, je stigmatise une gestion coûteuse et médiocre, les faux-semblants d’une pseudo pause fiscale (on parle de taux jamais de bases), le recours de plus en plus fort à l’emprunt, la baisse des investissements. Le tout au profit d’une politique sans cohérence et sans perspectives, aux antipodes de notre projet pour Nice, celui dont j’ai rappelé les grandes lignes au moment du DOB. Ma conclusion aura pour effet d’énerver Madame l’adjointe aux Finances et Monsieur le sénateur-maire qui ne trouvent à opposer à mes arguments qu’une insolite critique… de la fiscalité régionale : « Je ne sais pas si c’est dû à la proximité de Noël, mais le budget que vous nous soumettez aujourd’hui, composite, massif et marbré de contradictions, a tout d’un pudding. La preuve du pudding avait dit, en son temps, Engels, c’est qu’on le mange. Gageons que les Niçois le trouveront quelque peu indigeste. Et c’est bien parce que nous partageons cette conviction que nous voterons contre ». (On peut retrouver l’intégrale de mon intervention sur mon site)

Acropolis
Sur ce sujet, j’interviens au nom du groupe, en reprenant l’essentiel des arguments opposés ici même la semaine dernière. Nous refusons que le Palais des Congrès niçois devienne un pion dans la stratégie d’une multinationale de l’événementiel. La majorité vote la délibération, soutenue par le FN. Nous votons bien sûr contre. En fin d’après-midi, nous apprenons que le tribunal a décidé d’accepter le référé de l’Association Nice-Acropolis. Le contrat avec GL Events ne sera donc pas signé avant le 9 janvier, au mieux. Ambiance du côté du maire et de ses adjoints…

CANCA
Tout de go, le maire nous confirme l’immense tendresse qui est la sienne pour une institution où l’opposition est bannie et où l’on prépare les délibérations entre maires (sic), en dehors des séances officielles. Il est décidément difficile de rompre avec sa famille d’origine. Jean-François Knecht met en évidence, avec beaucoup de pugnacité, ce véritable déni de démocratie.
Contrats de projet
Cette nouvelle mouture des contrats de plan devait être un grand moment de réflexion sur les priorités de notre ville en matière d’équipements. En fait, on nous somme d’accepter un patchwork de projets plus ou moins compatibles. A prendre ou à laisser avant le 31 décembre. Ce sera à laisser. Paul Cuturello se fait un plaisir d’expliquer notre abstention.

Les délibérations succèdent aux délibérations, toutes n’ont pas la même importance. Une d’entre elles me va toutefois droit au cœur. Après des mois et des mois d’attente, les habitants du 51, avenue Borriglione vont enfin voir leur immeuble endommagé par les travaux du tramway réparé par la mairie qui va se substituer au propriétaire défaillant. J’en suis heureux et soulagé car le danger était réel comme l’avait précisé l’arrêté de péril imminent.

Il est vingt heures trente. Dernier coup de théâtre : le maire soumet au Conseil une motion visant à condamner le référé concernant Acropolis. Au nom des élus de Nice plurielle encore présents, je décline l’invitation pressante du maire : il n’est pas question pour nous de porter un jugement sur une décision de justice. Nous ne participons pas au vote. Colère finale du maire…

RETRANSMISSION DU CONSEIL MUNICIPAL SUR NICE TÉLÉVISION
JEUDI 21 DECEMBRE DE 10 H À 14 H ET DE 21 H 30 À 01 H 30
VENDREDI 22 DECEMBRE DE 13 H À 17 H

19 décembre 2006

Merci à la femme chocolat

Séance plénière du Conseil général. Vote du budget.

Notre chef de groupe JFK étant en voyage humanitaire au Bénin, c'est Paul Cuturello qui s'y colle. Discours musclé qui détonne dans l'atmosphère feutrée de l'hémicycle remis à neuf. La réaction agacée voire énervée du Président-Ministre montre à l'évidence que la cible est touchée. Le groupe Socialiste et Verts du CG ressemble à l'Olympique Lyonnais : les remplaçants sont aussi bons que les titulaires...

Début d'après-midi, c'est au tour de la recrue du dernier mercato, Dominique, de prendre la parole sur les questions liées à la politique d'aide aux personnes âgées ou handicapées. La petite équipe d'experts qu'elle a réunie lui permet d'intervenir avec compétence sur ces sujets, mais plus encore - et c'est cela l'essentiel - de faire bouger les lignes dans l'intérêt général.

Pour ma part, le regard fixé sur la ligne bleue du Conseil municipal de mercredi, je me contente de quelques interventions sur la politique culturelle. Tout en me félicitant de la mise sur orbite d’une véritable politique du cinéma (je vais représenter le groupe dans le comité de lecture chargé de sélectionner les projets cinématographiques susceptibles d’être subventionnés par le département), je regrette une fois de plus notre absence de volontarisme en matière de création de demande culturelle, seul facteur de démocratisation véritable.

Je zappe les dernières délibérations pour rejoindre aux alentours de vingt heures le CLAJ, pour la traditionnelle réunion de préparation du CM avec Nice Plurielle. Au programme du jour : le budget primitif, Acropolis, les contrats de projet, le rapport annuel de la CANCA et l’avenir… du terrain Sulzer. Excusez du peu !

Il est donc bien tard quand la journée s’achève. Une journée heureusement éclairée par… Olivia Ruiz. « Profitant » du chantier du tramway et des transferts Nice Nord – CADAM – CLAJ, j’ai découvert l’univers musical de celle dont on parle tant, y compris sur ce blog. Aussi, cette journée austère et laborieuse sera quelque peu adoucie par cette chanteuse qui vaut infiniment mieux que son statut de « staracadémicienne ». Entre rengaines néoréalistes et rock alternatif, son monde est très personnel, parfois un peu étrange, toujours stimulant. Quelques titres flirtent même avec les Rita Mitsouko de la grande époque. En plus sucré.

« Laisse fondre tes hanches nutellasses
Le sang qui coule en moi, c’est du chacolat chaud
Un jour je vais m’envoler
A travers le ciel
A force de gonfler
Et je baillerai des éclairs
Une comète plantée entre les dents
Mais sur terre en attendant
Je me transforme en la femme chocolat ».

Merci femme chocolat qui sait aussi nous rappeler fort à propos (Thérapie de groupe) :
« Et si on essayait un peu
De voir notre petit monde d’en haut
Au lieu de laisser choir nos idéaux ».

15 décembre 2006

Les têtes de séries en finale


Le scénario possible de l’élection présidentielle se met petit à petit en place avec la probabilité de plus en plus forte d’une finale entre les deux têtes de séries : Ségo et Sarko.

Malgré les ratés de son voyage au Proche-Orient, quelques déclarations à l’emporte-pièce susceptibles d’inquiéter certains milieux (je pense par exemple à la Recherche), Ségolène Royal s’installe progressivement dans son rôle de candidate de l’ensemble de la gauche et pas seulement de Désirs d’avenir. Elle a notamment bien maîtrisé le débat sur l’écologie qui sera à l’évidence l’un des points forts de la campagne.

Parallèlement, le PS a su faire les sacrifices nécessaires pour empêcher des candidatures PRG et MDC, ce qui modifie considérablement la donne par rapport à 2002.

A gauche, il n’y aura donc qu’elle, une candidature PC qui n’aura de rassemblement que le nom (et pas le non) et les duettistes de l’extrême gauche. Et n’oublions pas que le fantôme du 21 avril sera un puissant facteur de rassemblement.

Nicolas Sarkozy, quant à lui, a été obligé, du fait de la primaire maîtrisée des socialistes, d’avancer sa déclaration de candidature. Ce changement de programme lui a finalement été bénéfique dans la mesure où on voit mal comment un autre candidat de sa famille politique pourrait venir brouiller les cartes. Et ce n’est pas le pitoyable « débat » interne à l’UMP qui risque de modifier cette réalité.

Du coup, malgré les commentaires et les sondages alarmistes, cette forte présence des deux champions de la gauche et de la droite relativise le danger Le Pen. Même s’il ne faut jamais sous-estimer l’adversaire, en l’occurrence l’ennemi. Un nouveau 21 avril exigerait un effondrement d’un des deux candidats majeurs ou un FN progressant de dix points. La situation n’est donc pas la même qu’en 2002 surtout si on considère que Sarkozy, en utilisant un discours propre à séduire l’électorat d’extrême droite, risque d’affaiblir Le Pen.

Chaque Présidentielle permet l’émergence de personnalités nouvelles. En 2007, seul Nicolas Hulot, s’il se présente, semble être en mesure d’être dans ce cas de figure. Pour disputer, au mieux, la quatrième place à François Bayrou qui lui peut recueillir les voix des décus du ségolénisme et du sarkozisme.

Ainsi, à quelques mois du scrutin, tout semble indiquer que la Présidentielle 2007 permettra un véritable débat de société projet contre projet. Démocrates et républicains, ce ne sont pas les socialistes qui vont s’en plaindre.

12 décembre 2006

Epilogue à Stepanakert


Lundi. Avec Didier, Alain, Myriam, Pierre, Marina, Luciano et Nina, nous persistons et signons en remettant aux autorités un rapport qui se limite aux objectifs de notre mission : l’observation formelle du scrutin.

C’est ainsi que nous avons constaté le libre accès aux lieux de vote, l’absence de pressions sur l’électeur, et le respect des conditions généralement exigées pour une consultation électorale. En clair, le déroulement des opérations nous est apparu régulier, libre et transparent, malgré quelques imperfections relevant plus souvent de la maladresse que de l’intention, et que nous avons soigneusement consignées.

Par contre, nous sommes quelque peu scandalisés par l’attitude des observateurs des républiques russophones fantoches de Transnistrie, d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud qui n’hésitent pas à instrumentaliser la cause arménienne au profit de leurs aventures sécessionnistes. Les inviter a été une erreur. A moins que ce ne soit une preuve de faiblesse vis-à-vis du géant russe très présent dans la région, CEI oblige…

A midi, le Président Arkhady Ghoukasyan proclame les résultats, il faut bien le dire sans surprise, du référendum constituant. L’adoption de cette constitution, qui en vaut bien d’autres, semble le satisfaire, même s’il ne cède pas à l’euphorie. En effet, il a bien intégré que cette adhésion massive du peuple du haut Karabagh à ce texte qu’il a proposé n’entraîne pas - loin s’en faut - la reconnaissance internationale de son pays. Celle-ci passe nécessairement par un accord général des principaux acteurs de la région et même au-delà.

Mais si la route qui mène de Stepanakert à New York est effectivement très longue, celle qui mène de Stepanakert à Erevan est infiniment plus courte. Je peux personnellement en témoigner : six heures de minibus à gaz à l’aller comme au retour !

Karin Tak vote

Dimanche. Dès huit heures, en ce jour de référendum constituant, avec Didier, collaborateur du Conseil de l’Europe, mon binôme, Araïc, notre chauffeur, et Christina, notre interprète, nous partons sur les routes accidentées et parfois glacées du Haut Karabagh en Niva 4x4.

Notre mission d’observation nous conduit d’abord dans la ville de Shoushi, véritable petit Vukovar à moitié détruit par les bombardements azéris de la décennie précédente. Au détour d’un bureau de vote, nous rencontrons une délégation parlementaire de Transnistrie, ce qui, à la lumière de nos mésaventures estivales, a une saveur particulière.

À Karin Tak, la « ville sous les pierres » (en réalité sous une falaise), des hommes encore jeunes nous expliquent comment, en 1992, ils ont repoussé l’offensive de près de deux mille Azéris. Le Tableau des Martyrs montre à quel point cette bataille de douze heures a été meurtrière. Mais aujourd’hui, Karin Tak vote et c’est la fête au village.

Puis ce sera Ajgestan, Khachen, Vank. Au passage, nous visitons l’église du XIIIe siècle de Gandzasar, une église typiquement arménienne qui semble sortir de Calendar, le plus beau des films d’Atom Egoyan.

À Kischan, Christina nous montre les ruines de sa maison familiale détruite par la guerre. Enfin, ce sera Nor Ghazanchi et Askeran. Régulièrement, j’amuse mes interlocuteurs en leur racontant nos péripéties électorales dans le 7e canton de Nice… L’accueil est partout chaleureux, dans des écoles dignes de La gloire de mon père ou de salles de spectacles ambiance Kusturica. Dans l’une d’elles, on se lave les mains à la vodka… Assurément, une première ! De bureau en bureau, nous constatons que le déroulement du scrutin est formellement satisfaisant. En fin de journée, Didier aura toutefois un échange viril mais correct, comme on dit dans L’Equipe, avec un solide quinquagénaire moustachu qui s’avèrera être le Vice ministre de l’Agriculture.

À partir de vingt heures, dans le plus grand cinéma de Stepanakert, les premiers résultats tombent. Le Oui l’emporte largement, mais la participation reste modérée ce qui est un gage de sincérité. Sincérité : c’est le terme que j’emploie lorsque je suis interviewé par la radio nationale, tout en rappelant que nous n’avions pas à juger de l’opportunité du scrutin. C’est d’ailleurs cette ligne de conduite qui nous amènera à refuser de signer le document préétabli par la Présidence au profit de nos propres conclusions.

11 décembre 2006

Le corridor de Latchine


Samedi. Départ pour le Haut Karabagh.

Il s’agit de parcourir environ trois cent cinquante kilomètres le long des frontières du Nakhitchevan et de l’Iran. Notre délégation franco-serbo-italo-croato-russo-danoise (ouf !) est répartie dans deux minibus de fabrication russe qui ont la particularité de fonctionner… au gaz !

Entre ruines industrielles, silos rouillés et pipelines éventrés, la première centaine de kilomètres me permet de repérer une fois de plus dans le paysage les stigmates du bricolage productiviste de l’époque soviétique.

Puis c’est l’émerveillement devant des paysages de montagne chaotiques et sévères miraculeusement adoucis par une fine couche de neige blanche. Presque par inadvertance, le programme musical de notre chauffeur nous propose un standard d’Abba. Instantanément j’imagine Priscilla, la folle du désert australien, parcourant écharpe au vent les chemins d’Arménie…

Très vite, la nuit nous surprend. C’est dans l’obscurité que nous pénétrons après un petit contrôle routier dans le corridor de Latchine. En fait, cette route qui traverse une région de l’Azerbaïdjan a été attribuée à l’Arménie au moment du cessez-le-feu de 1994. Quelle que soit l’évolution du conflit, elle restera un véritable cordon ombilical entre le Haut Karabagh et la République d’Arménie.

Ce n’est donc pas sans émotion que nous empruntons cette route mythique qui rend notre chauffeur complètement euphorique. Plutôt prudent et calme depuis notre départ, il se transforme en Vatanen du Caucase et son modeste Lada en Audi quattro de la grande époque. C’est sur les chapeaux de roues que nous avalons les deux derniers cols de la journée et en trombe que nous entrons dans Stepanakert pour assister à notre premier briefing sur le référendum au ministère des Affaires étrangères.

09 décembre 2006

Retour à Erevan

Voir Mission au Haut Karabagh


Deux ans après.
Deux ans et un mois exactement.
Retour à Erevan.
L’arrivée au cours de la nuit… Même si le grand aéroport post-soviétique a laissé la place à une installation plus conforme aux standards internationaux, on n’est pas loin de la réminiscence…

C’est que la situation politique du pays et de la région n’a pas beaucoup évolué depuis ma dernière visite.
La France a voté une nouvelle loi anti-génocidaire, mais ici rien n’a changé : le conflit avec l’Azerbaïdjan n’est toujours pas résolu, la Géorgie n’a toujours pas récupéré ses régions dissidentes. Si proches et si présents, la Turquie continue à hésiter, l’Iran à gronder et la Russie à peser.

Après avoir traversé le petit Las Vegas caucasien qui jouxte l’aéroport, la Volga de mes accompagnateurs glisse dans l’obscurité d’une ville qui ignore l’éclairage public, ce qui donne parfois à certains quartiers un aspect lugubre.

De mémoire, je me repère dans cette capitale à dimension humaine que j’avais longuement sillonnée à pied lors de mon dernier passage. Je retrouve avec bonheur la superbe place de la République en constatant avec satisfaction que l’immense panneau publicitaire vidéo qui remplace la statue de Lénine a été déconnecté.

Nous arrivons à l’hôtel. Il est cinq heures. N’en déplaise à Jacques Dutronc, Erevan ne s’éveille pas encore.

08 décembre 2006

De Nice-Acropolis à GL Events-Acropolis

Après des années de surplace, d’indécision et d’irresponsabilité, la mairie de Nice a décidé d’attribuer, à la suite d’une négociation directe (les élus d’opposition de Nice plurielle étant écartés), la gestion d’Acropolis au groupe international GL Events et cela pour dix ans.

Jacques Peyrat a donc reculé devant l’éventualité d’une mise en régie du Palais des Congrès niçois, une hypothèse pourtant évoquée lors du Conseil municipal de septembre (Acropolis adieu).

De fait, nous passons de Nice-Acropolis à GL Events-Acropolis et chacun comprendra que ce n’est pas qu’une question de vocabulaire. Nice-Acropolis était un instrument au service de la politique économique et touristique de la ville. Que cet instrument, au fil des années, soit devenu de moins en moins performant ne changeait rien à sa vocation première. GL Events-Acropolis sera un petit rouage dans le dispositif du premier groupe international sur le marché de l’événementiel, un dispositif qui s’étend de Barcelone à Budapest en passant, par exemple, par Lyon et Toulouse. Au-delà du statut juridique (public-privé), c’est bien de la maîtrise de l’instrument au service de la collectivité qu’il s’agit.

Obtenir un certain nombre de garanties sur cette question essentielle pour l’avenir économique de notre cité sera l’objectif de Nice plurielle au cours du débat qui précèdera le vote du Conseil municipal du 20 décembre prochain. Sans illusions particulières.

07 décembre 2006

Hors champ

Mercredi soir, j’assiste à l’assemblée générale de l’association Hors champ. J’aime ces réunions où l’on peut mesurer l’enthousiasme de ces militants discrets pour qui vivre pleinement une passion consiste avant tout à la faire partager.

Hors champ s’est donné comme mission de faire connaître l’art brut à travers notamment le cinéma. Avant d’être présenté à l’association par mon amie Joëlle, j’avoue que ma proximité avec l’art brut était toute relative : comparaison rituelle, dans mes cours, du Traité de Maastricht… avec le Palais du Facteur Cheval devant des étudiants étonnés, citation furtive dans ma pièce, « Fragments de Nice », à propos des fauves du Douanier Rousseau…

C’est grâce à Hors champ que j’en ai appris un peu plus. L’art brut est une forme de création spontanée à l’origine quasiment clandestine et qui s’épanouit en dehors des circuits culturels. Historiquement, l’aventure commence dans les hôpitaux psychiatriques, avant de se développer chez les… médiums, dans les prisons, et par le travail de nombreux autodidactes éclairés.

Cette forme de création artistique, à la fois si singulière (d’ailleurs, la variante vulgarisée de l’art brut a été baptisée « art singulier ») et si excitante, est mise en valeur chaque année par des Rencontres organisées par Hors champ à l’auditorium du MAMAC.

À partir de là, les aider à obtenir les subventions indispensables est pour moi une ardente nécessité, renouveler mon adhésion un acte symbolique pour leur dire ma gratitude. À chaque fois qu’on nous aide à élargir le champ (en l’occurrence le hors champ !) de nos enthousiasmes artistiques, c’est une vie un peu plus belle qu’on nous offre.

06 décembre 2006

Stars are not born

Lundi soir, pour une réunion en principe interne au PS (il s’agissait de préparer la campagne présidentielle), même scénario que pour le meeting de la Fête de la Rose ou de quelques unes de nos dernières réunions publiques : une madame Loyal ou un monsieur Loyal présente les orateurs (c’est-à-dire nous) dans un style « tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil » et surtout « tout le monde il est un élu formidable ». Cette emphase est un peu déplacée ; de nombreux militants m’en ont fait la remarque.

S’il s’agit d’affirmer que les élus du PS font leur boulot, je serais tenté de dire que c’est la moindre des choses. S’il s’agit de prétendre que les élus du PS font un travail exceptionnel, le fait que ce soit dit par d’autres socialistes nuit beaucoup à la crédibilité du propos. Laissons les électeurs le confirmer. Quand, en plus, l’inimitié entre l’encenseur et l’encensé est de notoriété publique, on ne fait que nourrir l’accusation d’insincérité dont on suspecte souvent les élus.

Par les temps qui courent, il est de bon ton de prétendre faire de la politique autrement. Contentons-nous déjà de la faire simplement.

04 décembre 2006

Mission au Haut-Karabagh


Invité par le Président Arkady Ghoukasyan que j’ai eu l’honneur de rencontrer deux fois à Nice en tête-à-tête, je ferai partie le week-end prochain de la délégation de juristes étrangers chargée d’expertiser le référendum constituant proposé aux habitants du Haut-Karabagh.

Le Haut-Karabagh est une enclave de nationalité arménienne en territoire azerbaïdjanais. Il est le fruit des recompositions des états russes au cours du XXe siècle et du machiavélisme de Lénine et Staline qui avaient compris que pour régner, il fallait diviser.

Il y a quinze ans, après la dislocation de l’URSS, l’Azerbadïdjan nouvellement indépendant a remis en cause l’autonomie de sa région du Haut-Karabagh peuplée aux trois-quarts d’Arméniens. S’en est suivie une guerre avec la République d’Arménie – elle aussi indépendante depuis peu – soucieuse de la sécurité de ses compatriotes. Cette guerre (1991-1994) , finalement gagnée par l’Arménie, a permis au Haut-Karabagh de proclamer une indépendance qui ne sera pas reconnue internationalement.

Les Azéris du territoire ont donc grossi les camps de réfugiés de l’autre côté de la frontière. Je me souviens avoir vu en 1995 à Bakou ces réfugiés installés, dans des conditions précaires, dans les jardins publics de la ville.

Cette situation rappelle d’ailleurs étrangement celle du Kosovo dans les Balkans où la minorité d’une région autonome soutenue par le pouvoir central provoque une guerre civile qui tourne à son désavantage. Ainsi, la minorité (les Serbes du Kosovo, les Azéris du Haut-Karabagh) devient la victime du conflit dont elle a pris l’initiative.

Depuis 1994, la situation est figée, le Haut-Karabagh survit grâce à l’aide de l’Arménie. Une solution est recherchée dans le cadre du groupe dit de Minsk coprésidé par la France, la Russie et les Etats-Unis. Mais le conflit reste toujours dans l’impasse.

Il va de soi qu’en ce qui me concerne cette mission a un caractère purement technique (acter le bon déroulement du scrutin) et n’implique pas l’approbation d’une solution définitive par rapport à une autre. En effet, même si, depuis longtemps, je suis sympathisant de la cause arménienne (Nous sommes tous des Arméniens de Van, 24 avril), je ne crois pas en une solution unilatérale qui humilierait cet Azerbaïdjan qui compte aussi chez nous de nombreux amis (je le sais ayant été membre de la première délégation universitaire qui a jumelé l’Université de Nice–Sophia Antipolis et l’Université de Bakou).

En tout cas, ce voyage sera pour moi l’occasion de clarifier mes idées sur cette question si épineuse du Caucase Sud souvent occultée en France par le Caucase Nord et la guerre de Tchétchénie, même si, à long terme, chacun a compris que des peuples aussi culturellement proches (malgré les religions) que ceux de Géorgie, d’Arménie et d’Azerbaïdjan ont un destin commun. Un destin commun qui devrait en faire, à l’instar d’une Turquie européenne, une passerelle entre ces deux civilisations dont on nous prédit régulièrement l’affrontement pour le siècle à venir.

03 décembre 2006

Lost in translation

Intrigué par la sélection de certains d’entre vous dans les trente glorieuses, je me suis enfin décidé à visionner Lost in translation. Je l’ai fait avec une absence totale d’à priori vis-à-vis de Sofia Coppola. En effet, j’avais été très sensible au charme vénéneux de Virgin suicides (j’étais à la première de la Quinzaine des réalisateurs en présence de la tribu Coppola). Par contre, Marie-Antoinette a été pour moi, cette année, la vraie déception du Festival (C’est nous les Africains).

Je ne sais pas si, dans quelques semaines, une fois bien installé dans ma mémoire et mes émotions, le film s’incrustera dans la fameuse « Liste des 30 », mais d’ores et déjà, j’ai le sentiment d’avoir vu un grand film, malgré le format DVD. Un grand film simple et touchant.

Dans ce qui semble être la capitale de l’ennui, Tokyo, Bob Harris, acteur de fin en carrière, profite d’un contrat publicitaire pour vivre avec délectation un pic de sa crise de la cinquantaine. Charlotte, jeune fille trop tôt mariée, a accompagné son époux photographe qui la délaisse. La non histoire de ces deux-là dans un univers inconnu à mi-chemin de Tati et Nothomb, est à la fois pittoresque et universelle, tendre et mélancolique.

Sofia Coppola, bien aidée par un couple d’acteurs convaincants (Bill Murray, Scarlett Johansson), nous raconte avec pudeur ces périodes de la vie où, entre un bilan doux-amer, un présent sans surprise et un futur incertain, on hésite, le cœur au bord des lèvres. Et avoir vingt ans ou cinquante ne change rien à l’affaire. Le dire avec légèreté, sans emphase ni psychologie de bazard, c’est tout le charme de Lost in translation.